La collection

LA COLLECTION

Son esprit et ses énergies parcourent ma vie. Celle ci est organisée en partie comme une promenade de curiosité, de découverte et d’étude.

J’organise mes déplacements et ses niches d’existences comme de micro systèmes me permettant d’articuler, ma vie humaine, artistique et professionnelle à travers l’usage des collections qui en assurent les diverses économies internes.

Une partie de ma pratique artistique questionne le cabinet de curiosité.

L’essentiel de ma vie se constitue autour de la collecte de curiosités. Je suis de fait en partie collectionneur de collections. Ma prédilection va néanmoins à l’esthétique art deco et art nouveau à travers gravures, céramiques, lampes et objets divers du quotidien.

L’exercice de mon regard est typique des multi collectionneurs qui se sont rompus des années entières à la chine et à la pratique de rencontres et d’occurrences opportunes liées à leurs collections diverses. Ce regard s’exerce sans cesse sur plusieurs plans d’accommodations complémentaires cherchant à pister les indices et signaux à décoder pour nourrir les collections de pièces rares et singulières. Un certain type de penser en strates et rhizomes en découle dés lors dans la mise en culture du quotidien.

Attentif et vigilant au surgissement du kairos , je collectionne les gestes, attitudes et atypismes pouvant en favoriser le surgissement. Je suis un fervent adepte de ce que les anglo-saxon nomment Serendipity…..J’ai ainsi pu avec succès croiser et acquérir dans mon fond de collection Zadkine, Molinier, Othoniel, Pignon et bien d’autres raretés etc

A l’occasion de rencontres fortuites, étranges et opportunes j’ai par exemple, pu troquer des œuvres des débuts de Jean Michel Othoniel contre des cartes de curiosité Michelin.. Etc J’ai ainsi glané en plus des objets, une collection d’anecdotes singulières qui nourrissent les abords d’un petit panthéon de précieux objets d’art collectionnés au secret.

Comme pour tout collectionneur, « Mes collections sont fluides », les objets et pièces ne font que passer et ainsi géographies et contours des collections changent. Quoi que métaphoriques ces allusions ne sont pas nécessairement des indices ancrant uniquement le propos dans des « Echos » narcissico-freudiens ou Lacaniens qui ne seraient que réductions.

La possession en est temporaire, les objets extraits du flux du quotidien y retournent croisant d’autres regards, d’autres désirs, d’autres lieux, d’autres collections, participant ainsi à nouveau de l’usure*du monde et de son érosion*.

Le collectionneur collecte également en partie pour protéger en retranchant du monde ( changer la valence de chronos par l’ extraire et le retranché ) puis exerce ensuite l’acte inverse de dessaisissement qui opère un retour au monde de l’objet, quasi néo-artefact, augmenté et cœfficienté d’un n variable pour le collectionneur .Le label ou libel « a appartenu ou fait partie de la collection de » en porte preuve, en témoigne et le valide dans l’étiquetage paravalorisant, mais important et quasi indispensable de ce métamonde « martchand ».

La plus value témoigne économiquement du gain de valeur de cet usufruit qu’a pu accomplir l’exercice d’élision d’un regard dans ce retranchement du temps du flux du monde investi sur l’œuvre et l’objet.

.Un des moteurs du collectionneur est la recherche de jalons affectant et démontrant la/sa survalorisation estimée de son regard. Avoir su pré-voir et avoir su exercer sa préemption dans un autre ordre du temps ( comprimé, condensé, metavalorisé différemment) de l’objet à élire qui est à ses yeux valeur discernée et sera demain dans le discernement futur d un nouvel assentiment des valeurs partagées du monde fait partie de la recherche de cette preuve…Le « dessaisir » permet le saisir de cette preuve.

En effet, le retour de l’objet dont le collectionneur se dessaisit à l’ordre marchand du monde, entache, mais détache «  le coupon(s )» et produit « le dix vies dans  de »  …produit de l’exercice …de la collection.

Le collectionneur « co-efficiente » sa vie d’une dimension n sur des plans « inframinces » ou  « metaminces » à travers l’économie de gestion de sa collection qui architecture et niche sa vie. Le collectionneur par ce qu’affecte sa vision et l’acuité de son regard, capté sur des feuillets infra mince du réel se place et effectue un placement déliberé en des lieux croisés du monde.et de la vie, car elle est un « Croisement », un peu à l’image de la villa de Patrick Bouchain qu’il nomme Metavilla… « mets ta vie là » qui a pour fonction d’organiser dans le commerce de l’échange «  la collection *, celle des fluidités et parcours croisés des habitants et des hommes de la metacité. Leur rendant ainsi à travers l’échange et la parole un regard actif dénouant ce que la cité produit comme aveuglement et cécité.

Le dessaisissement est le point culminant de la collection, identique à la culminance de la quète ou du croisement. IL fait partie intégrante de son économie. La collection ne peut ainsi se réduire à une fixité d’objets possédés. Elle est à considérer comme la mise en mouvement quasi organique de la/des traces du geste d’un regard qui, dans un cillement, voit et organise les objets du monde méconnus, peu ou non reconnus, par la majorité des autres regards du monde, puis les retourne à l’ordre du monde en s’en dessaisissant. Le temps de ce cillement et clin d’œil illustrent ce temps de retrait ou l’objet, la pièce ou l’œuvre se soustraient à l’horizon public pour entrer dans un paradigme infra coefficienté du temps d’elision du collectionné, en tant que « à part tenant » au collectionneur.

Si la collection ruine parfois pour sa constitution, elle produit aussi de la richesse car elle fait quitter la cécité en nourrissant le regard et les capacités de spéculation mentale par les rapprochements qu’elle induit. Paradoxalement c’est lorsqu’elle se disperse qu’elle perd de sa force de spéculation, mais gagne en valeur spéculative à la mesure de son retour à l’ordre marTchand* du monde. Ici s’infléchit la célèbre phrase de Giap inscrite sur l’igloo de Mario Merz en 1968   » Si l’ennemi se concentre, il perd du terrain. S’il se disperse, il perd sa force. «  si les autres collectionneurs sont des rivaux ils sont aussi des partenaires , le commerce de l’art est plus proche d’un acte de séduction civilisé que d’un acte guerrier de prédation victorieuse.

En tant qu’artiste collectionneur j’ intègre, participe et anticipe cette économie en la déplaçant…je la coefficiente de poésie et l’inscrit de fait dans le futile ce que je nomme par «dés-oeuvrement »…le capitalisme fut-il poétique ?

La pièce de contre-cabinet de curiosité développée sur le net depuis 3 ans s’inscrit dans cette démarche active de poétique futile du « dé-collectionneur » cherchant la preuve du fut-il ?

*Usure… dans son acception économique de coefficientation d’une valeur de désir, d’appartenance et de plus value ou de valeur ajoutée….contre partie de la valeur accordée a l’élection et la dessaisie dans l’acte de po/depossession du collectionneur.

*Erosion …au sens ou je l‘emploie ordinairement mélange de Chronos et d’Eros dans sa petite et sa grande économie de frottement , d’abrasion et de « commerce » du désir.

*Collectionacte de collecte des humeurs et fluidités organiques d’un corps.

*Ordre marTchand…celui des marTchands du temple du libéralisme bien entendu pour qui «  l’art est le seul moyen de donner de la valeur additive à l’argent »

Etna Corbal le 22 10 06 P S : Voir CV et Pièce de Curiosité de collection sur le net

Pour table ronde sur la collection le 3 11 2006 CAPC de Bordeaux dans le cadre de NOVART 2006